Avec plus de 100.000 tonnes de produits halieutiques capturés de manière illégale par an, les autorités militent pour que les nationaux investissent dans ce secteur d’activités encore contrôlé par les étrangers.
Les produits de la pêche au Cameroun contribuent fortement à la consommation locale. Le poisson par exemple tiré des eaux camerounaises fournit chaque année 300 000 tonnes sur le marché local. Mais cette contribution à la demande nationale est menacée par la pêche illicite. Ce sont plus de 100.000 tonnes de produits halieutiques qui sont capturés par an de manière illégale, dans les eaux camerounaises selon les estimations officielles.
Selon les autorités, la pêche INN (illicite non-déclarée et non réglementée) est surtout pratiquée par les bateaux appartenant aux étrangers. La grande majorité des navires de pêche présents dans les eaux camerounaises ces 5 dernières années proviennent de la Chine en l’occurrence. Selon l’ONG Environnemental Justice Foundation, 63% des navires de pêche présents au Cameroun en 2022 appartenaient à des étrangers contre seulement moins de 40% pour les nationaux. Aujourd’hui, les autorités encouragent les entrepreneurs locaux à s’investir autant dans l’aquaculture que dans la pêche industrielle. Car, les richesses tirées de ces activités sont jusqu’ici plutôt bénéfiques à d’autres pays. Or, le marché existe et a un fort potentiel. La demande locale du poisson par exemple peine à être comblée. On observe encore un déficit d’au moins 200 000 tonnes de poissons par an. Ce, sans compter le marché extérieur où la qualité des produits halieutiques en provenance du Cameroun est appréciée. Bien plus, les autorités affirment, qu’il y a de nombreux avantages pour les locaux comparés aux conditions appliquées aux étrangers.
« Nous avons le projet d’appui au développement de l’entrepreneuriat aquacole qui a démarré. L’Etat a également lancé un appel à manifestations pour encourager les privés à s’investir et nous avons de très bons résultats là-dessus. Il y a de grands industriels qui s’investissent actuellement », souligne Guy Iréné Mimbang, directeur des pêches de l’aquaculture et des industries halieutiques au ministère de l’Elevage, des pêches et des industries animales (Minepia).
Les pratiques hors normes reprochées à ces étrangers sont diverses. Il y a entre autres, la pêche sans licence de pêche ; la pêche dans les zones de reproduction, l’utilisation de produits et engins proscrits, la non-déclaration des données de capture ou encore la mauvaise déclaration. Dans la plupart des cas, la quantité de produits prélevés n’est pas celle déclarée. Des mauvaises pratiques qui font en sorte que des quantités importantes de ressources halieutiques échappent au contrôle des pouvoirs publics. Les pertes fiscales sont estimées à environ 20 milliards de FCFA par an. Et l’impact va au-delà. « La pêche INN fait en sorte que les Etats ne rentrent pas dans les différents stocks qui sont exploités par d’autres flottes, et qu’ils ne recouvrent pas les revenus économiques qui peuvent en provenir », précise Guy Iréné Mimbang.
Malgré tout, le gouvernement poursuit la lutte contre la pêche illicite. En 2023, 15 navires ont été sanctionnés et 7 radiés pour des actes de pêche INN.
Aristide Takoukam, président Ammco
« Il n’est pas question de chasser les investisseurs étrangers »
« Aujourd’hui, c’est une formation implémentée avec notre partenaire au Ghana Cemlaws et le ministère de la pêche et des industries animales au Cameroun. Cette formation vise en effet la pêche hauturière car c’est par ce qu’elle n’est pas bien gérée que le Cameroun a récemment eu le carton rouge de l’union européenne. Et bien avant, le Cameroun avait reçu un carton jaune. Et cela avait été causé par le pavillon de complaisance. C’est-à-dire, le fait qu’un pays enregistre les bateaux étrangers sans prendre la peine de vérifier leurs antécédents de pêche et permet ainsi aux navires qui ont été chassés dans d’autres pavillons d’autres Etats de se réfugier dans le pavillon camerounais. Donc le Cameroun devenait ainsi un refuge pour les navires qui ne veulent pas se conformer à la pêche durable. Pour toute économie il est toujours intéressant d’encourager l’investissement local par ce que déjà cela permet de garder les devises et permet aussi d’avoir un contrôle de l’activité. Il n’est pas question de chasser les investisseurs étrangers mais d’encourager les nationaux à s’engager dans la pêche industrielle par ce qu’il y a du potentiel. »